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Du 7 au 9 février se sont déroulées les Rencontres YPAL 2025, cette sixième édition durant le FARaway Festival a réuni 54 jeunes passionné.es des arts du spectacle vivant pendant 48H dans la ville des Sacres.
En quelques chiffres, les Rencontres YPAL 2025 c’est :
- 54 membres
- 7 pays représentés (France, Italie, Espagne, Irlande, Croatie, Turquie, Géorgie)
- 5 spectacles / performances
- 2 rencontres artistiques
- 13 ateliers proposés
L’essence des Rencontres réside dans ces ateliers, qui ont pour but de réunir et forger les connexions entre les membres YPAL. Il s’agit du support du dialogue culturel, celui-ci prend 3 formes ; les ateliers de réception, les ateliers de pratiques artistiques et les ateliers de réflexion.
Zoom sur le programme
Vendredi 07/02 :
WHEN THE BLEEDING STOPS – Lovísa Ósk Gunnarsdóttir
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Texte de Perrine Capelli
When the Bleeding Stops est un spectacle de la danseuse et chorégraphe islandaise Lovísa Ósk Gunnarsdóttir qui se focalise sur la ménopause et plus particulièrement le ressenti de la chorégraphe et des femmes en général lors de cette période de leur vie. La performance commence par un long monologue de Lovísa Ósk Gunnarsdóttir qui explique son expérience face à la ménopause entremêlée avec son passé de danseuse et la blessure qui l’a poussée à arrêter la danse durant plusieurs années. L’artiste explique que c’est une routine précise qu’elle s’est remise de sa blessure : elle allait marcher le matin, une chanson lui passait par la tête puis en rentrant elle passait cette musique et dansait sans réserve dessus.
Elle raconte que les premiers signes de la ménopause l’ont poussé à en parler avec son entourage féminin et elle s’est retrouvée à leur conseiller la même routine qui lui a permis de faire face à sa blessure. De là l’idée du spectacle est née, et il s’est développé pour aussi accueillir sur scène des femmes ménopausées venant des villes où son spectacle est représenté. Ainsi, des videos de femmes qui dansent sur des musiques différentes sont projetées une à une sur les murs de la scène. Enfin, le spectacle s’est terminé avec l’apparition de ces femmes rémoises qui ont répondu à l’appel sur scène pour danser toutes ensembles pendant quelques minutes, nous offrant un final tout aussi poignant qu’émouvant.
À la fin du spectacle, Lovísa Ósk Gunnarsdóttir invite aussi le public à venir sur scène pour danser sur ‘Dance Monkey’ de Tones and I, pour que nous puissions nous aussi ressentir les bienfaits libérateurs de la danse : une très belle façon de terminer le spectacle.
After DJ set – Milleans
Étant une grande fan de musique électronique, j’ai eu l’occasion de découvrir le set de Milleans, et j’ai vraiment apprécié l’expérience. Elle a un style unique, alliant différents genres musicaux tels que la pop, le soul, le RnB, la house et l’électro, ce qui rend ses sets très variés et dynamiques. Les transitions étaient parfaitement maîtrisées, créant une continuité fluide entre les morceaux et maintenant une bonne énergie tout au long de la performance et de la soirée.
J’ai particulièrement aimé l’atmosphère qu’elle a su créer : un mix entre plusieurs genres musicaux créant une ambiance conviviale. C’était aussi un excellent moyen de rencontrer des gens et de partager un moment de danse et de fête ensemble. Milleans sait comment captiver son public, et son objectif de faire vibrer le dancefloor a été largement atteint. Ce fut un vrai moment d’euphorie.
Samedi 08/02 :
Workshop IA-IA-oh! by Angelica, Beatrice & Antonio
Texte de Mathis Delacourt
Dans cet atelier de création, l’intelligence artificielle propulse l’imagination vers l’inattendu… En effet, vous n’êtes plus maîtres de votre récit, et ce dernier est influencé par un nouvel outil de création dont vous découvrez toutes les capacités.
Répartis en petits groupes, les participants conçoivent des personnages atypiques, qui évoluent dans une histoire collaborative. Préparez-vous à rencontrer une femme ailée, un âne sur Mars, ou encore un pizzaïolo intergalactique ! Assisté par l’intelligence artificielle, votre récit devra composer avec des rebondissements scénaristiques inattendus, des improvisations visuelles et des trouvailles délirantes.
Par ailleurs, vous êtes amené à tourner dans différents groupes, ce qui est une superbe opportunité pour dialoguer avec tous les autres participants, mais aussi pour susciter la création en faisant rencontrer vos univers mutuels. Il en résulte un atelier fluide, fun et interactif. Il déchaîne la créativité de chacun, et la machine vous assiste pour l’amplifier sans jamais l’étouffer. Soyez fous, car chaque idée trouvera sa place !
Workshop Vibrant Body, building connections through rhythm by Viola
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Texte d’Anne Assaker
Quelle meilleure façon de commencer l’un des premiers ateliers du festival qu’en créant du lien entre les participants ? C’est exactement ce que Viola avait en tête — et ce qu’elle a brillamment réussi à faire — avec son projet Vibrant Body. Grâce au mouvement et à la musique, cet atelier a créé un puissant sentiment de connexion entre les participants.
L’atelier a commencé en douceur. Les participants marchaient dans la salle, en portant consciemment leur attention sur chaque partie de leur corps, une à la fois. Cette exploration lente encourageait la conscience de soi et de son corps.
Dans la deuxième phase, les participants se sont laissés guider par le rythme de la musique, écoutant leur corps et explorant librement le mouvement. Au fil de la session, ils ont commencé à prendre en compte la présence des autres. Ils se déplaçaient en tenant compte des trajectoires et des mouvements de ceux qui les entouraient, échangeant des regards et partageant leur énergie et établissant (silencieusement) des liens.
Ce lien s’est approfondi lorsque les participants ont commencé à interagir les uns avec les autres par le mouvement, sans contact physique au départ — exprimant énergie et émotions uniquement à travers leurs gestes. Puis, à travers de simples contacts des mains, ils ont peu à peu introduit une connexion physique. Progressivement, ils ont synchronisé leurs mouvements, créant ce que Viola appelait un cœur collectif — un rythme partagé, inspiré de leurs propres battements de cœur.
La phase finale invitait les participants à explorer leur relation avec l’espace. Chacun a choisi un objet ou une partie de la salle, a imaginé son battement de cœur, et s’est laissé guider par ce rythme. Cet exercice a transformé l’espace en une présence vivante et vibrante, renforçant la connexion des participants non seulement entre eux, mais aussi avec leur environnement.
Bien qu’ils ne se connaissent pas auparavant, les participants se sont sentis étonnamment à l’aise pendant cet atelier. Bouger ensemble a brisé les barrières, rendant la connexion naturelle et fluide. À la fin, ils n’étaient plus seulement des individus partageant un même espace — ils faisaient partie d’un groupe qui avait bougé, ressenti et vibré à l’unisson.
Avec Vibrant Body, Viola a transformé de simples mouvements en interactions profondes, l’individualité en collectivité, et l’espace en un élément essentiel du processus.
Workshop Discussion in Motion by Perrine & Lara
Il est fascinant d’observer le processus créatif en action. Crystal Pite, une artiste canadienne visionnaire, a inspiré Laura, une chorégraphe exceptionnelle, dont l’approche pourrait être une véritable source d’inspiration pour le workshop.
Le ballet présenté était unique en son genre, les danseurs évoluant sur des voix enregistrées. Des extraits de répétitions du ballet, ou même d’une pièce de théâtre, ont été intégrés. L’objectif était de transmettre les émotions non par la parole, mais à travers le mouvement, interprétant les voix par le geste.
Le début de l’expérience a été un peu difficile, la prise de confiance n’étant pas immédiate. Il y avait une certaine retenue, une hésitation. Cependant, au fur et à mesure, on se laisse emporter par le jeu, et il devient un véritable plaisir de se plonger dans l’interprétation. Ce n’est plus une question de créer quelque chose de “beau” ou de “théâtral”, mais simplement de performer avec sincérité et justesse.
L’échange en groupe de quatre a été particulièrement enrichissant, chacun apportant sa propre perspective et énergie à la performance. En fin de session, un moment d’échange sur les ressentis a permis de clore l’expérience de manière conviviale et constructive. Ce moment partagé a été aussi agréable que profond, et a permis d’apprécier toute la richesse de cet exercice collectif.
Workshop YPAL development by YPAL Legacy avec Anne Goalard
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Texte de Lara Milosevic
Le festival YPAL, à travers son programme YPAL Legacy dirigé par Anne Goalard, illustre brillamment l’évolution d’un projet artistique et culturel ancré dans une dynamique européenne. Depuis sa création en 2009, YPAL s’est affirmé comme un réseau incontournable pour les jeunes passionnés de spectacle vivant, favorisant des rencontres interculturelles et le dialogue entre artistes émergents et confirmés. L’atelier sur le développement du réseau YPAL a offert une rétrospective fascinante sur l’histoire du projet tout en esquissant ses perspectives d’avenir face aux défis contemporains. En s’appuyant sur une décennie d’engagement, YPAL Legacy témoigne d’une ambition renouvelée : celle de consolider une plateforme d’expérimentation artistique tout en renforçant le rôle de la création dans la construction d’une citoyenneté européenne partagée.
OVERWHELMED – Jennie Bringaker
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Texte de Lara Milosevic
La performance Overwhelmed, créée par Jennie Bringaker pour l’exposition Louise Bourgeois. Conversations imaginaires, explore avec intensité la tension entre la production et la contrainte, la liberté et le poids des fardeaux intérieurs. À travers une gestuelle tantôt fluide, tantôt entravée, les danseurs de la compagnie SUPERNOVA – Rikke Baewert, Loan Thanh Ha et Venke Marie Sortland – traduisent physiquement cette lutte entre la vulnérabilité d’un corps sans carapace et la rigidité d’une protection qui limite les mouvements. Fidèle à son approche artistique qui brouille les frontières entre l’humain et l’animal, Bringaker offre ici une réflexion visuelle et corporelle sur l’identité en perpétuelle mutation. Loin d’être une performance figée, Overwhelmed évoque un état de devenir, une métamorphose incessante où le corps, contraint et libéré à la fois, devient le lieu d’un dialogue intérieur profond et universel.
ON PEUT FAIRE DES AIRS – Ensemble-Ensemble
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Texte de Polina Romanets
Lors du festival YPAL, une performance a captivé les spectateurs par son originalité et sa poésie musicale : On Peut Faire des Airs, présenté par le groupe Ensemble Ensemble.
Ce collectif de musiciens venus d’horizons culturels variés nous a offert un voyage sonore inédit, mêlant des références musicales allant de la Norvège à la Roumanie. Inspirés par la nature et le concept de l’unité dans la dissonance, ils tissent un patchwork sonore où se rencontrent rythmes et mélodies, se fondant en une harmonie saisissante.
La représentation s’est tenue au Manège, un lieu chargé d’histoire, initialement conçu pour le cirque. Son architecture majestueuse et son atmosphère unique ont renforcé la dimension envoûtante du spectacle. La mise en lumière, particulièrement travaillée, a transformé l’espace en une véritable fresque visuelle évoquant les couleurs mouvantes d’une aurore boréale, accentuant ainsi l’aspect quasi mythique de la performance.
Leur musique évoque, pour certains, un chant ancien, un appel vibrant de la nature, ou encore la personnification même d’un phénomène céleste. Avec une approche expérimentale, ils intègrent des sons inattendus dans leur performance, allant jusqu’à utiliser une feuille comme instrument de percussion.
L’improvisation occupe une place centrale dans leur processus créatif : chaque musicien joue sa propre mélodie tout en écoutant attentivement les autres, créant ainsi un dialogue sonore unique. Une philosophie musicale qui, selon eux, devrait s’appliquer à la vie en société : affirmer son individualité tout en restant à l’écoute du monde qui nous entoure.
Ensemble Ensemble nous a ainsi offert une expérience sensorielle inédite, où l’indépendance artistique et l’harmonie collective se rejoignent dans un même souffle musical.
Love Boat – Fêtes L’amour / JØR / Lorcan Kelly / DJ Tracksüit
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Texte de Nestor Greene
Le point culminant de la deuxième journée, « Fêtes l’Amour », a marqué nos esprits. La sélection musicale des DJ irlandais et britanniques a fait vibrer le plancher de danse sur une sélection poignante de Power House et de UK Garage, ce qui a donné une fête dynamique et fort sympathique. Aussi, comme nous étions parmi les cent premiers arrivés, nous avons tous reçu un billet commémoratif. La décoration de la fête avait pour thème « Love Boat », ce qui était tout à fait littéral puisque le DJ se trouvait dans un bateau (un accessoire, pas un vrai bateau) sur scène. Le lieu même, « La Cartonnerie », a accentué le caractère unique du spectacle en utilisant sa salle de concert comme toile de fond pour le « Love Boat». La fête n’a vraiment commencé qu’après 23 heures, mais une fois qu’elle a commencé, elle n’a pas cessé jusqu’à ce que la dernière danse ait été tapée et la dernière goutte de bière versée. Tout cela a conduit à une expérience unique et agréable qui a duré jusqu’au petit matin.
Dimanche 09/02 :
Workshop : My Body, my voice by Manuela
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Texte de Daphné Babadzan
L’atelier My Body My Voice a été conçu comme un atelier pour travailler sur le lâcher prise et le travail en conscience, ouvert à tous sans besoin d’expérience en danse ou théâtre. Retour sur cet atelier qui a charmé les YPAL 2025 ce dimanche 9 février.
Sur une base de danse contemporaine, l’atelier a permis aux participants à travers divers exercices de se reconnecter à leur corps mais aussi d’apprendre à redécouvrir des voies pour se reconnecter à son soi intérieur au-delà des préjugés et du regard des autres. Diverses pratiques de motricité ont été mobilisées, notamment en demandant aux participants de dessiner des lettres dans l’espace. À l’aide des instructions de Manuela, les participants ont pu apprendre à être plus conscients de leur corps et d’apprendre à travers des mouvements expressifs et des exercices vocaux un nouveau moyen de raconter leur histoire personnelle.
Le travail en groupe a été rendu facile par une bienveillance généralisée, une envie de lâcher prise collective et une volonté de se reconnecter aux autres à travers une forme de “communauté vocale”. La richesse de l’atelier a su le rendre apaisant et agréable pour tous les participants, conquis par l’expérience
Workshop What we can do from where we come – Cristina
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Texte de Perrine Capelli
L’atelier de danse contemporaine mené par Cristina se concentre sur l’initiation du mouvement à travers le haut du corps et notamment le dos. Ainsi, nous avons commencé par travailler en binôme, le premier guidant le second qui doit expérimenter avec les mouvements de son corps. A travers un travail progressif, Cristina nous amène à explorer notre corps et ses capacités. Le guidé est ensuite laissé par son binôme qui l’observe danser et doit définir ce qu’il voit en un mot. Ensuite les rôles sont inversés pour suivre le même processus.
Après cela, Cristina nous a guidées pour danser tout ensemble sur la musique en se focalisant tantôt sur les hanches, le bas du corps et le haut du corps. Le but est aussi de danser quelques temps avec un partenaire puis d’échanger dans une frénésie enivrante au son des notes de musique.
Pour terminer l’atelier, nous avons dû écrire un mot pour nous définir durant cet atelier, puis avons échangé avec notre binôme le mot que nous avions écrit sur lui/elle, le but étant de réfléchir sur la manière dont nos mouvements sont perçus et comment nous les ressentons.
Workshop Trouver sa voix by Louna
Animé par Louna, cet atelier partait d’un constat alarmant : en 2021, les femmes ne représentaient que 34% du temps de parole à l’antenne selon l’INA. Une inégalité qui illustre les difficultés des personnes sexisées à se faire entendre dans l’espace public.
Dans une atmosphère bienveillante et en petit comité, cet atelier non-mixte avait pour but de travailler la prise de parole en public et de donner à chacune les outils pour affirmer sa voix. L’objectif ? Se sentir légitime à parler, éviter de se faire interrompre et gagner en aisance à l’oral, que ce soit en réunion, en cours ou face à un auditoire.
L’atelier débutait par la lecture de discours féministes, permettant d’analyser des prises de parole inspirantes. Louna, étudiante en master à Sciences Po et ancienne membre d’une association d’éloquence, partageait ensuite des techniques concrètes : posture, gestuelle, gestion du stress, articulation. À travers des exercices pratiques, elle nous apprenait à capter l’attention et à s’imposer avec assurance.
Cet atelier a été un véritable moment de sororité, où chacune a pu expérimenter sans crainte, dans un espace sécurisant et stimulant. Un premier pas vers une voix plus forte, plus libre.